La moitié des nouveaux traitements pour les maladies rares ne parviennent pas jusqu’aux patients
pharma.be, l'organisation coupole de quelque 130 entreprises biopharmaceutiques innovantes actives en Belgique, a pris connaissance avec intérêt du rapport NEED publié aujourd'hui par le Centre Fédéral d'Expertise des Soins de Santé (KCE), mais émet quelques remarques.
Rechercher des innovations liées à des besoins médicaux est la mission essentielle et l'objectif principal du secteur biopharmaceutique innovant. Les chiffres prouvent qu'il ne se contente pas de trouver les « fruits à portée de main ». Encourager l'innovation est la clé du progrès.
Le développement de médicaments innovants nécessite des investissements soutenus sur le long terme, avec des résultats incertains en cas de succès. De plus en plus de traitements ciblent spécifiquement certaines caractéristiques des patients, parfois individualisées.
La recherche réalisée par les entreprises (en collaboration ou non avec les universités et les centres de recherche) se concentre donc principalement sur les besoins non rencontrés des patients et des citoyens. Mais ces besoins changent également. Prenons par exemple l'apparition inattendue de la pandémie de COVID-19. Avec le projet NEED, le gouvernement tente d'identifier les besoins médicaux pour lesquels il n'existe pas encore de solution. Toutefois, cela nécessite une approche non pas statique, mais dynamique.
Rôle du gouvernement
Le gouvernement se doit de jouer un rôle actif en encourageant l’innovation et en renforçant un système qui a clairement démontré, au cours des dernières décennies, que d’énormes progrès ont été réalisés dans le domaine des soins de santé.
Afin de mieux relever les défis médicaux, le gouvernement devrait contribuer à :
- Stimuler l'innovation par la recherche et le développement afin de répondre aux besoins médicaux de manière rapide et efficace. En moyenne, seule une molécule sur 10.000 au début de la recherche aboutit à un succès. Il convient donc de prévoir des incitations supplémentaires pour poursuivre les efforts de recherche sur ces besoins non rencontrés afin d'augmenter les chances d'obtenir des traitements efficaces pour les patients.
- Renforcer la voix des patients. Ils sont experts de leur maladie et devraient donc être plus activement impliqués dans les procédures d'accès au marché.
- Reconnaître la valeur ajoutée de l'innovation incrémentale en matière de médicaments.
- Développer un agenda politique ambitieux en matière de données de santé et de numérisation qui permette aux chercheurs, y compris dans les entreprises, de travailler de manière plus ciblée et de mesurer la valeur ajoutée.
- Collaborer avec l'industrie, un modèle qui a fait ses preuves depuis des décennies. Encourager davantage les partenariats entre la science et l'industrie.
Les solutions ne viennent pas d'elles-mêmes
Le gouvernement et l'industrie partagent le même objectif : répondre aux besoins des patients. Depuis des décennies, d'innombrables scientifiques au sein des universités, instituts de recherche et entreprises pharmaceutiques du monde entier s'efforcent d’améliorer les traitements existants et de trouver des solutions efficaces pour les maladies, en se basant sur les besoins médicaux non rencontrés. Parallèlement, nous devons noter qu'il existe encore de nombreuses maladies rares en attente d'un (meilleur) traitement ou d’une cure. Il existe également des maladies pour lesquelles il existe des traitements, mais qui ne permettent pas de guérir ou de rétablir totalement la qualité de vie. La recherche de solutions est souvent entravée par un manque fondamental de capacité scientifique et de compréhension de la biologie sous-jacente de ces maladies (rares).
Trop peu d'attention est accordée à cet aspect. Il est utopique de penser que lorsqu'un besoin non rencontré est défini ou répertorié, sa solution suivra automatiquement et dans un délai raisonnable.
Quelques faits intéressants
- Rien qu'en 2022, 24 nouvelles autorisations de mise sur le marché de médicaments orphelins pour le traitement de maladies (ultra)rares ont été accordées par l'Agence européenne des médicaments (EMA), ce qui porte à plus de 230 le nombre total de médicaments orphelins pour les maladies (ultra)rares bénéficiant d'une autorisation de mise sur le marché dans l'Union européenne depuis l'introduction de la législation sur les médicaments orphelins en 2000. Cela montre que, pour les maladies (ultra)rares, les entreprises s'attachent également à répondre aux besoins des patients et de la société, et pas seulement à ceux des grandes populations de patients.
- Actuellement, 30 % de tous les médicaments en cours de recherche sont axés sur les maladies (ultra)rares (IQVIA, février 2023, Global Trends in R&D 2023 : Activity, Productivity, and Enablers).
- Seuls 24 (39 %) des 61 médicaments orphelins enregistrés par l'agence européenne des médicaments (EMA) entre 2018 et 2021 étaient remboursés en Belgique le 5 janvier 2023. Seuls 53 % des 19 dossiers de médicaments orphelins analysés par le Comité de Remboursement en 2023 ont abouti à une approbation de remboursement par le gouvernement belge. Ces médicaments destinés à des conditions (ultra)rares ont donc été développés mais les patients n'y ont pas (encore) accès.
- Dans la longue quête d'un traitement efficace de la maladie d'Alzheimer, l'investissement privé en R&D clinique au cours des 25 dernières années s'est élevé à 42,5 milliards de dollars. De nombreux fonds publics ont également déjà été investis dans cette quête. Mais malgré cet engagement financier considérable, un traitement concluant reste introuvable, ce qui met en évidence la complexité inhérente à la compréhension et à la lutte contre les troubles neurologiques. Toutefois, malgré tous ces échecs, en 2022, 127 molécules étaient en cours de recherche (de la phase I à l'enregistrement) pour la maladie d'Alzheimer (IQVIA, février 2023, Global Trends in R&D 2023 : Activity, Productivity, and Enablers).
Il est préférable d’améliorer les systèmes de santé dans un cadre international/européen
La Belgique ne peut à elle seule améliorer le système. Des efforts supplémentaires seront nécessaires pour dresser un inventaire international de tous les besoins médicaux non rencontrés. Cet inventaire devrait être réalisé dans chacun des 27 États membres de l'UE, car les besoins varient d'un pays à l'autre (systèmes de soins de santé différents, approches thérapeutiques différentes, différences dans les populations de patients, etc.)
Toutes les parties concernées doivent participer à l'identification des besoins médicaux non rencontrés et à la définition des priorités.
Le partage des données au sein de l'Europe doit également être amélioré. L'Espace européen des données de santé (European Health Data Space) jouera un rôle à cet égard.
À force de persévérance et d’investissement dans la recherche, le secteur pharmaceutique innovant a pu réaliser des progrès considérables pour aider les patients et les citoyens. Cependant, il est confronté à de nombreuses incertitudes, à des voies de développement longues et à des besoins de plus en plus personnalisés, pour lesquels l'accès aux données de santé est crucial. pharma.be est convaincu qu’ensemble, nous pouvons relever ces défis, si nous sommes prêts à nous écouter les uns les autres et à construire de manière constructive un avenir dont la priorité absolue est la santé publique.
De meilleures incitations, telles que la protection des droits de propriété intellectuelle et la valorisation de la valeur ajoutée des nouveaux médicaments dans le cadre de la procédure de remboursement, sont des outils nécessaires pour continuer à supporter les énormes risques financiers associés à la recherche, également à l'avenir. Nous sommes aussi convaincus qu’être à l’écoute des patients et leur donner plus de poids dans les différentes étapes des processus de développement et de commercialisation est la meilleure façon de prendre en compte les besoins médicaux.
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